Inde et Népal : de nouveaux programmes pour toujours plus d’impact

Comment s’assurer que notre action réponde vraiment aux besoins des populations ? Telle est la question à l’origine de toutes nos décisions depuis plus de trente ans. Rechercher l’impact est notre priorité, celle qui nous pousse à réévaluer régulièrement nos programmes pour les adapter aux évolutions et les faire gagner en efficacité. Une approche aujourd’hui déployée en Inde et au Népal.
Toussaint Laurent entouré de l'équipe de l'association Taabar lors de sa mission de terrain à l'automne 2024

La Chaîne de l’Espoir a lancé ses programmes en Inde et au Népal la même année, en 2011. Particularité de ces deux pays : notre association ne dispose pas d’équipes sur place, mais elle collabore avec des organisations locales.

Avec Taabar* en Inde, nous sillonnons les bidonvilles de Jaipur, dans le Rajasthan, avec deux cliniques mobiles : l’une dédiée aux soins médicaux, l’autre pour accueillir les femmes et les jeunes filles (pour des sessions de sensibilisation, des dons de kits menstruels ou des consultations gynécologiques individuelles).

Au Népal, avec Child Protection Centers and Services (CPCS), nous intervenons dans 36 centres de santé installés dans des écoles de quatre districts.

« Nous aurions pu continuer ainsi, en faisant évoluer ces programmes petit à petit, commente Laurence Desvignes, responsable géographique Asie. Mais à La Chaîne de l’Espoir, nous ne prenons rien pour acquis et savons nous remettre en question. Il nous est donc paru important de prendre un vrai temps de recul afin d’évaluer avec profondeur l’utilité de ces actions. Avec un objectif clé : répondre aux besoins des bénéficiaires et contribuer au renforcement des systèmes de santé, via l’élaboration, entre autres, de stratégies pluriannuelles. »

Des besoins étudiés

Pour ce faire, La Chaîne de l’Espoir met en place une méthode structurée (lire p. 19 du Fil de l’Espoir n°21). La première étape consiste en un approfondissement de la connaissance du terrain, pour mieux en comprendre les besoins.

Toussaint Laurent, coordinateur programmes Asie, explique la démarche : « Comme dans n’importe quelle méthodologie d’enquête, les conclusions que nous en tirons se fondent sur des données scientifiques et des observations in situ. »

Ainsi, Amaury Frotté, chargé d’études, est venu en renfort de l’équipe pour s’immerger dans un vaste corpus de ressources bibliographiques. Sa mission a été de collecter les indicateurs les plus précis possibles. Son secret pour faire parler les données ? Sa formation d’anthropologue.

« Cela permet de mettre en perspective les données avec les contextes culturels. Par exemple, certains pays ne vont pas penser la médecine de la même manière que nous. Ou encore, en Inde, on parle souvent des bidonvilles comme d’entités homogènes, alors que les communautés, les langues, les religions, les castes peuvent être très différentes. Et comme j’ai beaucoup travaillé sur les questions de genre en anthropologie, cette lecture peut être utile quand on souhaite mettre l’accent sur la santé des femmes et des jeunes filles, comme c’est le cas en Inde et au Népal. »

En complément, Laurence Desvignes et Toussaint Laurent sont partis en mission à l’automne 2024 pour aller à la rencontre de leurs partenaires, mais aussi d’autres ONG, d’institutionnels locaux, nationaux, internationaux et, bien sûr, de professionnels de santé et hospitaliers.

« Ainsi, nous gagnons en visibilité, construisons ou renforçons des réseaux et, surtout, précisons les besoins à adresser », éclaire Laurence Desvignes.

Des actions ciblées

« C’est sur la base de ces investigations en amont que nous pouvons ensuite orienter notre action », ajoute Toussaint Laurent. Les stratégies ne sont pour l’heure pas encore arrêtées, mais des pistes ont d’ores et déjà été identifiées.

« Grâce aux rencontres terrain, nous gagnons en visibilité, construisons ou renforçons des réseaux et, surtout, précisons les besoins à adresser. »

Pour l’Inde, cela passera en premier lieu par la conduite d’une enquête de terrain, avec Taabar, pour affiner les besoins au sein des bidonvilles où nous intervenons. « Les données sont en effet parcellaires ou très officieuses. Pour certains d’entre eux, nous ne savons même pas combien de personnes y habitent. Il y a donc un gros travail à mener pour définir les indicateurs qui nous permettront, in fine, de gagner en efficacité en ciblant les zones où notre action est vraiment la plus pertinente », explique Toussaint Laurent.

Au Népal, afin d’optimiser l’impact, l’ambition sera de recentrer notre intervention auprès de notre partenaire sur notre cœur de métier, à savoir la santé.

« Les rencontres avec les acteurs institutionnels et hospitaliers ont également fait émerger un autre besoin : celui de renforcer la chirurgie pédiatrique de base en province et la chirurgie pédiatrique spécialisée dans la capitale, Katmandou. Une nouvelle mission sera menée prochainement pour évaluer comment nous pourrons à l’avenir nous positionner pour apporter notre expertise dans l’aménagement des locaux, l’équipement, la formation de chirurgiens, etc. », conclut Laurence Desvignes.

L’année 2025 sera donc très structurante pour notre action dans ces deux pays.

* «Taabar» signifie «enfant» dans la langue parlée au Rajasthan, le marwari. L’association a obtenu de la part des autorités
indiennes un certificat de reconnaissance et d’appréciation de son action, dans la catégorie «Meilleur travail social» dans le domaine de la protection de l’enfance.

2 questions à

Laurence Desvignes, responsable géographique Asie

En quoi la phase de rencontre avec les acteurs locaux est importante ?

Quel que soit l’endroit dans le monde où La Chaîne de l’Espoir intervient, nous n’agissons jamais de manière isolée. Cela répond à un vrai besoin exprimé par les populations et les gouvernements. Nous cherchons donc toujours à nous intégrer dans les cultures et les politiques de santé des pays. Échanger avec les acteurs institutionnels et gouvernementaux nous permet ainsi de comprendre les modes de fonctionnement des systèmes de santé, les priorités politiques, etc. De même, l’efficacité passe par une action coordonnée avec les autres organisations humanitaires présentes (nationales ou internationales). Quel sens y aurait-il à dupliquer des dispositifs déjà en place ? Pour un impact réel, il faut s’unir et coopérer.
Vous visez la construction de stratégies pluriannuelles. Pourquoi ?

Vous visez la construction de stratégies pluriannuelles. Pourquoi ?

Cela représente un changement d’horizon important. Jusque-là, nous avions plutôt l’habitude de travailler sur la base de stratégies annuelles. L’objectif désormais est de pouvoir construire un cadre pour deux, voire trois ans. Cette approche
structurante donne plus de visibilité à nos partenaires, financeurs, donateurs et tous ceux qui soutiennent nos actions. Mais cela suppose aussi une conception en amont méthodique pour être en phase avec les réalités du terrain et anticiper les évolutions.

Immergez-vous au cœur du quotidien de l’une des cliniques mobiles qui parcourent les bidonvilles de Jaipur dans notre reportage accessible en ligne