Afghanistan, une grave injustice pour les humanitaires tués

Notre chagrin est immense d’avoir perdu des collègues aussi généreux et humains. Et notre colère est immense elle aussi.

Notre chagrin est immense d’avoir perdu des collègues aussi généreux et humains. Et notre colère est immense elle aussi. Des médecins sont pris pour cible sous le fallacieux prétexte qu’ils pourraient être chrétiens. C’est oublier que la médecine n’a d’autre religion que l’humain.

Nous sommes quelques uns, à La Chaîne de l’Espoir et dans d’autres ONG médicales, à avoir voulu soigner les moudjahidines afghans malades ou blessés alors qu’ils luttaient, dans les années 80, pour chasser de leur pays l’envahisseur soviétique. Aujourd’hui, les combattants afghans de l’islam intégriste s’attaquent à ces mêmes médecins qui jadis avaient soigné au risque de leur vie au cœur des montagnes les populations afghanes en souffrance.

Sous le fantasme d’une prétendue croisade chrétienne, ils tuent ceux qui, depuis longtemps, ne sont là que pour les aider. Ils le savent et s’en moquent. Ils ignorent l’empathie et la compassion. Ils ne veulent aucun témoin étranger de leur obscurantisme et de leur irrespect de la vie. Ils sont terrifiants, ils nous font peur. C’est sans doute ce qu’ils souhaitent et ils y parviennent. Mais nous devons cependant apprendre à vivre avec cette peur parce que nous voyons tous les jours, à La Chaîne de l’Espoir, dans notre hôpital pour enfants de Kaboul, un Afghanistan qui n’est pas le leur, des Afghans qui ne leur ressemblent pas.

Tous, sans doute, sont de bons musulmans, des patriotes, mais aussi des êtres humains amicaux, accueillants, des parents aimants, reconnaissants de voir leurs enfants soignés par des médecins étrangers et afghans, indifférents aux identités religieuses, tribales et culturelles de leurs patients. Ces Afghans que nous voyons tous les jours dans notre hôpital seront les prochaines victimes d’un éventuel retour des Talibans. Cela n’a jamais été et ne sera jamais notre rôle, nous qui ne sommes que médecins, chirurgiens, infirmiers, pharmaciens, etc. que de lutter contre ces derniers. Mais nous pouvons alerter l’opinion internationale d’une triste réalité : l’obscurantisme opère, jour après jour, son retour en Afghanistan qu’il ne faut pour autant pas abandonner.

Eric Cheysson, vice-président de La Chaîne de l’Espoir