Revenir en arrière 23/03/2023 - Libanmalformation congénitaleenfantsreportageanomalie congénitale

Malformations congénitales : au secours des enfants les plus démunis au Liban

Au Liban, théâtre d’une violente crise financière, la population se paupérise et l’accès aux soins est limité. La Chaîne de l’Espoir vient en aide aux enfants issus de familles modestes qui souffrent de malformations congénitales.

Dans une salle de consultation de l’hôpital Khoury, à Zahlé (à 50 km à l’est de Beyrouth), Zeinab, cinq ans, regarde avec appréhension le Dr Abdallah actionner une scie. Il s’apprête à retirer son plâtre. Un mois plus tôt, ce chirurgien orthopédiste pédiatrique a opéré la petite fille afin de corriger un pied bot sévère. Il s’approche délicatement de sa jambe et ouvre le plâtre : « Regarde comme ton pied a changé ! Tu es contente ? » Le visage métamorphosé, Zeinab se tourne vers son père, sourire aux lèvres. Née avec une malformation congénitale, elle n’avait jamais pu être prise en charge, faute de moyens financiers dans sa famille. « Pour opérer ma fille, les hôpitaux m’avaient demandé plusieurs centaines de dollars », explique son père, Hussein. « Mais je travaille comme ouvrier et je suis Syrien, réfugié au Liban depuis 2014. J’ai beaucoup perdu avec la guerre dans mon pays, je n’ai pas les moyens. » L’été dernier, Hussein contacte La Chaîne de l’Espoir : « L’aide que nous avons obtenue a été salvatrice pour ma petite Zeinab. C’est grâce à l’association qu’elle a pu être opérée. »

Soutenir des enfants dans le besoin

En 2022, La Chaîne de l’Espoir a lancé au Liban un programme d’aide aux enfants atteints de malformations congénitales. Opérations chirurgicales, outils liés à la rééducation pédiatrique, mais aussi accompagnement psychologique : dans le cadre de cette assistance, les soins médicaux sont entièrement pris en charge par l’association. « Nous ciblons les familles qui n’ont pas les moyens de payer ces traitements », indique Pierre Abi Ramia, responsable des activités de La Chaîne de l’Espoir au Liban. À l’hôpital Khoury, les consultations et les opérations sont réalisées chaque jeudi par le Dr Tobby Abdallah. Depuis le lancement de la mission, il a principalement soigné des réfugiés : « L’association cible tous les enfants. Mais les patients atteints de maladies congénitales sont surtout des Syriens, car les mariages au sein des familles sont plus courants que chez les Libanais, ce qui accentue le risque de problèmes congénitaux. » Une nouvelle famille surgit dans la salle de consultation. La mère, Areej, présente la main droite de son garçon de huit mois, Watan. « Le petit souffre d’une polydactylie, indique le Dr Abdallah.

 Dans une semaine, je réaliserai une opération pour enlever son sixième doigt. » La famille est ensuite accueillie dans une pièce voisine par Sabine Sabbagh, psychologue pour La Chaîne de l’Espoir : « Comment vous sentez-vous ? Avez-vous du mal à dormir ? Vos angoisses affectent-elles votre enfant ? Durant nos séances, nous allons apprendre à gérer votre stress et à communiquer avec vos enfants. » Pour chaque patient et leurs parents, l’association propose un suivi psychologique avec au minimum six séances de groupe. Ceux qui le souhaitent peuvent également bénéficier d’un suivi individuel. « Nous aidons les parents à faire face aux problèmes médicaux de leurs enfants, indique Sabine Sabbagh. C’est un vrai défi, car ici, la santé mentale est encore taboue. » La mère de Watan, Areej, acquiesce : « Je n’ai pas l’habitude d’exprimer mes angoisses. Cela me fait du bien. » Un étage plus haut, Khatoun berce son bébé dans une chambre d’hôpital. Agée de huit mois, sa fille, Myriam, souffrait d’un pied bot sévère depuis sa naissance. Elle a été opérée le matin même par le Dr Abdallah pour corriger la malformation. « Elle doit conserver son plâtre pendant un mois, puis nous reviendrons à l’hôpital pour le faire retirer », raconte sa mère, soulagée que l’opération se soit bien déroulée. « Quand ma fille est née, c’était un vrai bonheur, confie Khatoun. Mais, en même temps, c’était une profonde tristesse, à cause de sa malformation. L’aide psychologique offerte par La Chaîne de l’Espoir nous aidés à accepter sa maladie et à tenir le coup, car l’opération chirurgicale était pour moi une grande source d’angoisse. » 

À quelques mètres, Sayde serre son enfant de deux ans, l’air bouleversé. Sa fille, Cham, se remet à peine de son opération, également réalisée le matin même. Elle souffrait d’une dysplasie de la hanche, une déformation congénitale. « Elle ne pouvait pas marcher normalement, indique sa mère, elle boitait. Après cette opération, nous ne sommes pas certains qu’elle récupérera totalement, mais marchera avec plus de facilité. Cela va l'aider au quotidien. » 

Une population démunie 

La Chaîne de l’Espoir est implantée dans plus de la moitié des régions libanaises afin d’aller au plus près des besoins des familles : « Il faut créer une proximité géographique avec les populations dans le besoin », témoigne Pierre Abi Ramia. Sur les hauteurs de Beyrouth, au sein de l’hôpital Hôtel Dieu de France, le chirurgien orthopédiste pédiatrique Ismat Ghanem tient un cabinet où il accueille les patients de La Chaîne de l’Espoir. Sur les murs, des cœurs et des messages de remerciement sont accrochés,  ainsi que des dizaines de dessins colorés, réalisés par les enfants soignés. « Je n’ai pas hésité une seconde quand La Chaîne de l’Espoir m’a proposé d’intégrer son programme. Avec la crise qui frappe le pays, la situation financière de la population empire », explique-t-il. Au Liban, la plupart des hôpitaux proposent un service de qualité. Néanmoins, l’accès aux soins, largement privatisé, est onéreux. « Dans ce contexte, les actions de La Chaîne de l’Espoir sont primordiales. D’autant plus que les patients sont le plus souvent des réfugiés syriens. Leur situation est précaire, non seulement sur le plan financier, mais aussi sur le plan social, car ils sont déracinés et la guerre les a beaucoup affectés. »

Le Dr Ghanem se tourne vers Mohammad Ali. Né avec une difformité à la jambe gauche, le garçon de sept ans a subi une chirurgie un mois plus tôt, avec le soutien de La Chaîne de l’Espoir. Il vient se faire retirer son plâtre. « Il doit utiliser des chaussures orthopédiques pendant six mois », indique le médecin. Dans les semaines qui viennent, Mohammad Ali suivra des séances de physiothérapie également financées par l’association. La mère, Fatimah, pose un regard attendri sur son fils. « Nous n’aurions jamais pu faire cette opération sans le soutien de La Chaîne de l’Espoir. » Elle l’aide à se relever, sourire aux lèvres : « Pour nous, c’est une nouvelle vie qui commence. » Photos © Jacob Russell

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Programme soutenu par l'AFD

La Chaîne de l'Espoir bénéficie du soutien de l'Agence Française de Développement (AFD) pour la prise en charge des affections congénitales orthopédiques. Ce projet de développement est d'une durée de 3 ans allant de mars 2021 à février 2024.