Enfants hospitalisés en France : toute une chaîne de solidarité

Familles d’accueil, « marraines ou parrains soleil », professionnels de santé partenaires, coordinateurs bénévoles… Ils se mobilisent tous pour faciliter l’hospitalisation et la convalescence d’enfants soignés en France. Rencontre avec ces héros du quotidien qui mettent leur cœur, leur énergie et leur disponibilité au service de la guérison et du bien-être des jeunes malades.

"C’est une expérience incroyable, d’une richesse inouïe", relate Élisabeth Traumat, qui est devenue famille d’accueil bénévole pour la première fois à l’été 2022. Elle a accueilli avec son mari, durant deux mois, la petite Ornella, Togolaise d’un an prise en charge par La Chaîne de l’Espoir afin d’être opérée du coeur au CHU de Bordeaux. Dans le cadre du programme Soins aux enfants en France, les familles d’accueil bénévoles veillent sur les enfants malades dès leur arrivée sur le territoire français, les accompagnent à tous leurs rendez-vous médicaux, les assistent lors de leur hospitalisation et prennent soin d’eux une fois rentrés à la maison jusqu’à ce que leur état de santé leur permette un retour dans leur pays d’origine.
« Je ne pensais pas qu’Ornella s’attacherait autant à nous ; et nous à elle. Je me souviendrai toujours du moment où elle a osé nous faire son premier sourire… », poursuit Élisabeth Traumat. « Chaque accueil est unique, car chaque enfant est différent. Mais dans tous les cas, c’est un enrichissement mutuel, confirme Claudine Moriclet, famille d’accueil bénévole depuis 2008 à Nantes. Par ailleurs, c’est toujours une histoire qui mobilise toute la famille, voire l’entourage. Dans notre cas, nous ne l’aurions pas fait si nos propres enfants n’avaient pas été partants également. Nous ne le regrettons pas, car ce sont de beaux moments de partage où l’on apprend à vivre ensemble, avec le respect des coutumes, des cultures, des langues…,complète-t-elle avant d’ajouter : Mais, bien sûr, il faut y être préparé, car ce n’est pas un long fleuve tranquille...»

70 enfants en moyenne sont transférés chaque année pour être opérés dans des hôpitaux de référence partout en France.

L’enfant qui arrive en France en vue de son opération est, en effet, très malade, souvent fatigué, désorienté et il ne parle pas forcément le français. « Ce ne sont pas des histoires simples et on doit donner beaucoup de soi, être disponible 24 h/24, se situer toujours à moins d’une demi-heure de l’hôpital…, renchérit Élisabeth Traumat. Il est donc nécessaire de bien réfléchir avant de se lancer, de se sentir forts affectivement, psychologiquement et physiquement. Et, surtout, il faut être bien entourés et ne pas hésiter à poser des questions aux autres familles d’accueil, ainsi qu’aux équipes de La Chaîne de l’Espoir qui sont là pour nous accompagner. »

Mobilisation générale

« C’est vrai que c’est un travail d’équipe qui demande beaucoup d’engagement de la part des familles, ainsi que de tous les acteurs impliqués de bout en bout », explique Chantal Jacques, chargée de soins. Tamila Chibane, coordinatrice du programme Soins aux enfants en France, rebondit : « C’est un véritable réseau de solidarité qui s’organise depuis le pays d’origine de l’enfant (principalement d’Afrique centrale et de l’Ouest) jusqu’en France. » De multiples acteurs, en effet, se mobilisent tout au long du parcours de l’enfant. « Cette très longue chaîne de solidarité a un seul objectif : la guérison de l’enfant. Et elle repose sur le lien de confiance entre tous les acteurs », précise Tamila Chibane.

 

Écoute, soutien et constance

Ce même lien de confiance unit bénévoles, soignants et familles dans le cadre du programme Accompagnement des enfants hospitalisés. Son objectif : permettre à des enfants à l’hôpital en France dont les parents ne peuvent être présents (essentiellement pour des raisons d’éloignement géographique ou de contextes familiaux difficiles) de recevoir la visite régulière des « marraines ou parrains soleil ». Ces bénévoles s’engagent à rendre visite plusieurs fois par semaine à un enfant hospitalisé qu’ils suivent tout au long de son séjour. « Pour tout le monde, une hospitalisation est source d’angoisse. Alors, imaginez pour un enfant seul, loin de ses parents, explique Viviane Zumsteeg, coordinatrice de ce programme à La Réunion. Alors, qu’une personne, toujours la même, vienne le voir plusieurs fois par semaine pour lui apporter de l’écoute, de l’affection, de l’amusement, partager un moment de vie, créer un lien… ça peut vraiment changer le cours de son hospitalisation. » Cette expérience, Jean-Claude Mangou l’a vécue à une douzaine de reprises depuis qu’il est devenu parrain soleil en 2008 : « Je vois mon rôle comme celui d’un compagnon. C’est une place unique en fait, car je suis le seul à tenir le rôle d’une personne “ordinaire” auprès de l’enfant, c’est-à-dire sans blouse blanche, sans avoir la préoccupation quotidienne de le soigner. Je suis là pour l’accompagner, lui changer les idées et lui faire connaître si possible la vie à l’extérieur de l’hôpital pour le préparer à la vie “normale”. C’est un engagement très humble finalement, mais qui procure tellement de joie… »

À La Chaîne de lʼEspoir, chacun est un maillon indispensable pour permettre la prise en charge, lʼaccompagnement des enfants malades. Ce sont de très belles histoires de vie. Nous avons besoin de la mobilisation de chacun.Stéphanie Grandemange, responsable géographique France

  

Accompagnement des enfants hospitalisés en France : des effets positifs pour tous

Une évaluation d’impact social, réalisée par l’Agence Phare et soutenue par la Fondation MNH (ex-Fondation nehs), a permis d’identifier les trois bénéfices de ce programme qui soutient en moyenne 120 enfants chaque année :

 

On voit tout de suite le bénéfice de la création d’un lien qui soit rassurant pour l’enfant. Cela lui permet d’être moins stressé et de moins s’ennuyer. Et pour l’équipe soignante, tout est bien cadré. Nous savons que le parrain ou la marraine soleil a été sélectionné(e), puis formé(e), et qu’il y a un contrat passé avec la famille. On n’y va pas au hasard, tout est structuré.Sylvaine Sondaz-Soulagnes, puéricultrice cadre de santé au CHU de Lyon